Risque d’exclusion !

 

   Suite au communiqué du ministère des finances pour les déclarations obligatoires sur le net.

 

  Comment vont faire les voyageurs qui n’ont pas comme moi la chance de lire et d’écrire pour ce battre avec un ordinateur !

 

 

 

  « On ne peut déchiffrer le monde quand on ne possède pas les codes qui inscrivent la loi dans l’espace publique. »

 

F. Diome, « Celle qui attendent ».

 

 

 

   Cette phrase fait écho au constat que nous faisons presque chaque jour lorsque des familles nous appellent et que nous mesurons qu’elles sont souvent en déficit de connaissances et d’apprentissages élémentaires pour être pleinement autonome dans leur vie citoyenne.

 

   Certes, nul ne peut tout savoir sur tout et personne ne serait à blâmer en cas de faillite à l’adage que nul n’est sensé ignorer la loi !

 

Néanmoins, il est un socle commun, acquis le plus souvent depuis l’école et pendant les études, classiques ou professionnelles, qui donne à chacun les clefs d’accès aux connaissances, à la logique des systèmes de pensées et à la compréhension des phénomènes ou des événements.

 

   Si personne n’a jamais appris à remplir un formulaire de la Sécurité sociale, des Allocations familiales ou une autorisation d’urbanisme, c’est pourtant cette base qui nous facilite les démarches que nous entreprenons ou auxquelles l’administration nous soumet tous un jour ou l’autre.

 

   Souvent les Voyageurs dont le fonctionnement relève d’un autre registre, ne possèdent pas cette culture commune, ou trop partiellement, pour déjouer les obstacles.

 

   Sans compter ceux que toutes les règles rebutent, il y a ceux que toute démarche administrative affole et décourage, qui « font l’autruche » en ignorant les règles à appliquer ; ceux qui, aidés ou non, veulent les appliquer mais n’en maîtrisent pas le sens ou les enjeux.

 

Il y a également celles et ceux qui comprennent l’essentiel mais qui ignorent les subtilités…

 

   Or le diable ne se niche pas dans les détails ?

 

  Aujourd’hui se développe une sphère d’intervention qui nécessite plus que jamais d’être en possession de toutes les clés d’accès au savoir et aux savoir-faire : il s’agit d’Internet, qui remplace de plus en plus le papier.

 

   De plus en plus de démarches deviennent ou deviendront obligatoires sur le réseau,comme déclarer l’activité de son entreprise, ses impôts, gérer ses comptes bancaires ou obtenir un crédit, remplir un formulaire administratif, acheter...etc.

 

  Si chacun sait depuis longtemps que le déficit de connaissances et d’apprentissage de base est un facteur d’exclusion sociale, l’accélération du recours aux technologies numériques fait craindre encore plus que le fossé la fracture numérique entre « ceux qui savent » et les autres, ne se creuse de plus en plus.

 

   Devant le sens de l’Histoire les Voyageurs – ils ne sont pas les seuls, on peut également craindre pour les personnes âgées – ne sont sans doute pas assez préparées à ce mouvement que rien n’arrête et qui aspire inéluctablement tout le monde.

 

    Pour les Voyageurs le handicap est lourd puisque nombreux sont ceux qui ne savent pas ou peu lire et écrire.

 

Pourtant leur sagesse les porte sincèrement à ne pas sacrifier sur l’autel du savoir une génération de plus, celle de leur enfants ou petit-enfants.

 

   Mais la rudesse de leur condition s’ajoutent à d’autres freins pour toujours les faire échouer…

 

   Pour combler le retard accumulé, ils doivent inscrire cette priorité absolue pour un avenir qui commence dés aujourd’hui.

 

   Sinon les futures générations trouveraient des raisons d’en vouloir aux anciens d’abord de n’avoir su comment les empêcher d’être « cloué au sol » par les réglementations « anti-voyage » qui les visent, mais aussi d’avoir ajouté l’exclusion numérique à l’exclusion sociale.

 

 

 

   Bulletin de liaison N°45 Mars 2016.                                                  Edito Marc BRAZIAT , Délégué Général